Dotations prévisionnelles de fonctionnement 2025 des collèges publics : des efforts bienvenus malgré les baisses imposées par l’État
Intervention de Najib Benarafa lors de la séance plénière du Conseil départemental des Hauts-de-Seine du 18 octobre 2024.
Monsieur le Président, chers collègues,
Cela fait plusieurs années que l’Etat délaisse l’école publique. Les enseignants français font partie des moins bien payés d’Europe, alors que ce sont eux qui ont le plus d’heures devant les élèves et qui ont le plus d’élèves par classe, selon les chiffres de l’OCDE.
Ces données expliquent que le recrutement d’enseignants compétents devient de plus en plus difficile en France.
Ajouté à cela, les différentes réformes ratées de l’éducation nationale. Celles-ci ont petit à petit fait baisser le niveau général comme l’attestent les derniers tests PISA. Surtout, elles ont aggravé les inégalités. Les élèves provenant de familles défavorisées, donc dont l’IPS, l’Indice de Positionnement Social, est faible, ont beaucoup moins de chance de réussir à l’école que les enfants provenant d’une famille dont l’IPS est élevée.
Le Département ne peut pas se substituer à l’Etat, pourtant il reste engagé dans la lutte pour diminuer le poids de l’origine sociale. En 2023, les crédits du budget de fonctionnement ont été majorés en fonction de l’indice de position sociale (IPS), ce qui apparaissait comme une bonne mesure de justice sociale.
Adapter les forfaits en fonction de l’IPS des établissement
Je vous avais fait remarquer M. le Président l’an dernier, que les forfaits élèves proposés en fonction de l’IPS n’étaient pas à la hauteur de la fracture qui existe entre les familles aisées et les familles les plus pauvres. Entre un collège dont l’IPS est élevé, c’est-à-dire supérieur à 120, et un celui qui a un IPS inférieur à 100, il y avait moins de 7€ d’écart dans le forfait par élève.
Vous aviez dit que vous alliez regarder, vous avez tenu parole et je vous en remercie. Nous sommes donc très favorables à cette proposition de revalorisation des taux par élève pour les collèges classés en REP ou REP+. Mais s’il reste des collèges dont l’IPS est inférieur à 100 et qui ne sont pas classé REP qui vont malheureusement échapper à cette revalorisation.
Dans votre discours aux chefs d’établissement, lundi dernier, vous avez souligné les efforts du Département pour que le budget des collèges reste stable. Malgré les baisses de recettes vous avez tenu à sanctuariser le domaine lié à l’éducation, ce qui n’est pas le cas du gouvernement dont les baisses de dotations horaires globales surchargent les classes rendant toute pédagogie différenciée ou inclusive de plus en plus difficile.
Le dispositif PREMIS
Seul reproche, vous avez privé brusquement, sans concertations préalables, certains collèges non REP du dispositif PREMIS, le plan pour la réussite à l’école et une meilleure insertion scolaire qui fonctionnait selon le principe du détour pédagogique, à savoir : le jeune redécouvre le sens du travail scolaire grâce à une nouvelle approche alliant ateliers thématiques et tutorat.
J’entends bien que vous vouliez marquer le coup vis-à-vis de l’Etat qui fait payer aux collectivités ses erreurs de gestion. Là où l’éducation nationale était déficiente, le Département a sans cesse développé des dispositifs pour compenser le lent désengagement de l’Etat sur l’échec scolaire.
Je sais que les temps sont difficiles économiquement et politiquement aussi d’ailleurs mais ils le sont encore plus pour les enseignants de l’éducation nationale. Et c’est un très mauvais signal envoyé à ces collèges qui ne sont pas REP mais parfois dont le l’IPS est inférieur à 100 comme au collège Gay Lussac de Colombes.
Dans ce collège PREMIS permettait à deux enseignants de faire participer les élèves à un atelier de construction d’un bateau pour leur redonner goût au travail. Et à la discipline. Et ça fonctionnait ! D’une année sur l’autre les enfants revenaient donner un coup de main sur leur temps libre pour poursuivre le projet. Une fois le bateau terminé, le collège trouvait des fonds pour amener les élèves du dispositif sur un plan d’eau et le tester le bateau.
J’ai discuté avec les principaux des 2 collèges non REP de Colombes qui bénéficiaient de ce dispositif. Ils sont désemparés. S’ils pouvaient encore utiliser les dispositifs PACTES proposés l’an dernier par l’éducation nationale, cette année le nombre de PACTE a été divisé par 2.
Si le Département se désengage aussi pour des sommes qui restent très faibles à notre échelle c’est l’image même du 92 qui en prend un coup. Alors qu’avec le programme îlots verts, l’agenda 2030 les incroyables dispositifs proposés comme Toutes culottées le Département faisait figure d’exception dans un contexte où de nombreuses institutions semblaient avoir abandonné à leur sort les enseignants.
L’avis de notre groupe
C’est pourquoi nous émettrons un avis favorable pour le budget des collèges des Hauts-de-Seine, même si l’inflation cette année n’a pas été prise en compte, même si le nombre de collèges qui ont subi un écrêtement pose question, car nous savons que l’implication du Département pour l’environnement éducatif est sincère.
Mais nous vous demandons encore de bien vouloir laisser vivre le dispositif PREMIS pour les collèges non REP dont l’IPS est inférieur à 100. Le budget du département en sera peu affecté et le retour sur investissement à long terme sur les enfants sera positifs. N’en déplaise aux économistes de Bercy, l’éducation est un investissement sur l’avenir, surtout si la démographie baisse et que les métiers sont en tension.
Maintenir ce dispositif pour les collèges non REP, c’est aussi reconnaître le travail des professeurs. Croyez-moi je suis sur le terrain et je connais personnellement nombre d’entre eux. Ils se sont investi depuis des années dans ce dispositif pour concevoir ces ateliers. Ils sont fatigués. Ils ont encore besoin du soutien du Département, surtout quand d’autres institutions les abandonnent à leur sort.
Retrouvez ICI notre compte rendu complet de la séance publique du 18 octobre 2024.