AESH dans les collèges, jeunes majeurs étrangers, plan climat et biodiversité… Les questions du groupe Écologistes & Socialistes au Préfet des Hauts-de-Seine (séance du 17 décembre 2021)

Retrouvez les questions posées par les élu·es en 2022 dans l’article suivant : Crise énergétique, dématérialisation et accès aux droits, mineurs étrangers sous OQTH : les questions du groupe Ecologistes & Socialistes au Préfet des Hauts-de-Seine (séance du 17 février 2023) – Ecologistes & Socialistes 92 (92-ecologistes-socialistes.fr)

Lors de la séance publique du Conseil départemental du 17 décembre 2021, les élu·es du groupe Écologistes & Socialistes ont pu poser des questions au préfet des Hauts-de-Seine, Laurent Hottiaux. Voici ces questions ainsi que les réponses apportées par le Préfet en séance (les séquences vidéo correspondantes sont visibles sur le site du Conseil départemental).

Les trois questions ont porté sur les conditions de travail et la rémunération des AESH dans les collèges du département (Joaquim Timoteo), sur les obligations de quitter le territoire français (OQTH) prononcées par la préfecture envers les jeunes majeurs étrangers (Dominique Trichet-Allaire) et sur la déclinaison du plan climat et la sauvegarde de la biodiversité à l’échelle du département (Najib Benarafa).

L’École de la République doit être attentive à chacun de ses élèves et être donc en capacité de tous les accueillir.

Question de M. Joaquim Timoteo : Monsieur le Président. Monsieur le Préfet, tout d’abord, je voudrais vous remercier, vous-même et les services qui vous accompagnent et vos collaborateurs et collaboratrices qui vous accompagnent ce matin pour ce moment d’échange, qui est toujours très intéressant et très riche, dans le partage de l’actualité altoséquanaise.

Vous avez évoqué tout à l’heure la question de la politique éducative comme un point important de l’intervention de l’État sur notre territoire et je voudrais, pour ma part, vous parler d’école inclusive.

L’École de la République doit être attentive à chacun de ses élèves et être donc en capacité de tous les accueillir. Cette école inclusive passe notamment par une scolarisation en milieu ordinaire des élèves en situation de handicap, avec un accompagnement individualisé.

Nous savons aujourd’hui toutes et tous les difficultés que rencontrent les familles pour que cet accompagnement soit pleinement assuré. D’ailleurs, les mouvements récents des accompagnants des élèves en situation de handicap nous ont rappelé la précarité dans laquelle ils se trouvent de leur côté. Comment, en effet, escompter avoir un accompagnement de qualité quand on impose à ces personnels contractuels des salaires moyens de 750 € par mois, avec des temps partiels imposés, ou encore dans des situations de devoir accompagner plusieurs élèves, parfois sur plusieurs écoles, voire sur plusieurs établissements, parfois même de manière simultanée ?

Au final, le résultat est que les élèves en situation de handicap se retrouvent avec un nombre d’heures d’accompagnement qui, quelquefois, baisse de manière drastique.

Aussi, Monsieur le Préfet, pouvez-vous nous préciser ce matin les différentes mesures engagées par les services de l’État dans notre Département, afin de garantir un accompagnement durable, un accompagnement de qualité, du premier jour au dernier jour de l’année scolaire, pour chaque élève souffrant de handicap, ainsi que les mesures engagées par ces mêmes services pour assurer le recrutement d’un nombre suffisant d’accompagnants ?

Je vous remercie.

M. le Préfet Hottiaux : Monsieur le Conseiller départemental, c’est évidemment une politique très importante, prioritaire. L’action de l’État est très volontariste sur le sujet de l’école inclusive ; je partage totalement votre constat sur sa nécessité, sur la nécessité d’accélérer, mais nous avons des résultats qui sont, me semble-t-il, intéressants et que je me permets de partager avec vous.

L’État est mobilisé en matière d’accompagnement dans le Département des six mille quarante-huit élèves scolarisés en situation de handicap, c’est une augmentation de près de 5 % entre 2019 et 2020. Vous savez que nous avons créé ce qu’on appelle les « PIAL » (pôles inclusifs d’accompagnement localisés) – et je salue l’implication très forte de Madame Fis sur ces sujets –, qui regroupent les établissements scolaires de premier degré et de second degré sur les différents territoires. Nous en avons quarante-huit, auxquels les AESH – accompagnant d’élève en situation de handicap – désormais sous contrat de trois ans, sont affectés.

94 % des élèves concernés par un accompagnement ont pu bénéficier d’un AESH au sein du Département, et vous savez que Madame la Ministre Sophie Cluzel regarde de très près ce que nous faisons dans le Département – et était elle-même très impliquée ici dans les Hauts-de-Seine –, que nous faisons un effort constant pour nous adapter à l’augmentation des besoins, le nombre de postes mis à disposition dans le Département augmente régulièrement, mais il y a des difficultés qu’il ne faut pas dissimuler malgré les moyens, et je ne crois pas qu’il y ait un vrai sujet de moyens.

La question est d’abord que la situation sanitaire a mené à l’absence de certains accompagnants, et c’est aussi une difficulté, le manque de candidatures par rapport à la hausse constatée des besoins, et là, on revient à toutes les questions qu’on a évoquées ensemble tout à l’heure, notamment sur les questions de logement. Les difficultés sont liées aussi à la question des rémunérations. Vous savez qu’il y a un alignement de la rémunération sur celle des ATSEM (agent territorial spécialisé des écoles maternelles). Nous veillons avec la DSDEN (direction des services départementaux de l’éducation nationale) à une meilleure publicité des offres, qui est aussi une question. La possibilité d’aller jusqu’à, pour les personnes, trente heures de travail par semaine, la formation mise en place de seize heures, un blog des AESH, AESH 92, a été mis en place, sur lequel sont régulièrement publiés ces informations et les contenus de ces formations.

Il y a des moyens importants, l’État se mobilise avec l’ensemble des partenaires, avec les communes, avec les associations, pour que nous puissions arriver à pourvoir tous ces postes, mais nous avons effectivement des difficultés. Je pense qu’elles sont surmontables, mais vous avez raison, on peut encore faire mieux.

En tout cas, il y a une politique très volontariste dans le Département et nous ferons tout pour atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés ensemble.

Dix-neuf jeunes majeurs étrangers sous la menace d’obligations de quitter le territoire… alors qu’ils ont été formés à l’école de la République

Question de Mme Dominique Trichet-Allaire : Bonjour, Monsieur le Préfet. Merci pour ce moment d’échange basé sur ce rapport d’activité. Ma question concerne la politique d’accueil des jeunes majeurs étrangers, et très précisément la situation de dix-neuf jeunes. Nous avons, en tant qu’élus, été alertés par différentes associations sur cette situation.

Vous avez été également, Monsieur le Préfet, interpellé par une lettre ouverte en juin 2021 sur ces situations de jeunes majeurs qui sont actuellement dans des parcours professionnels ou de formation. Cette lettre ouverte est portée par des dizaines d’associations et structures allant du réseau éducation sans frontières à des fédérations de parents d’élèves, la fondation Abbé-Pierre, mais aussi leurs centres d’apprentissage, parce que nombre d’entre eux sont apprentis, et également leurs patrons rassemblés dans une association Patrons solidaires. Je ne vous les cite pas toutes parce qu’elles sont très nombreuses.

Ces jeunes ont déposé une demande de titre de séjour à la préfecture de Nanterre. Or, ils ont reçu en octobre 2020 une obligation de quitter le territoire français assortie d’une IRTF (interdiction de retour sur le territoire français), ce qui est assez exceptionnel par rapport à la situation d’autres départements. Certains motifs étaient assortis d’éléments un peu contestables, puisque certains éléments faisaient part d’absences et de retards qui sont en fait en nombre très faible et qui ne marquent pas du tout une volonté de désintérêt par rapport à la scolarité, ceux-ci étaient dus à la situation de confinement et de crise sanitaire, et ceci a été appuyé par leurs professeurs et formateurs.

Ils ont fait des recours gracieux et vos services ont pris l’engagement de réexaminer ces situations. Or, à ce jour, nous n’avons pas de nouvelles.

Ma question porte sur la situation de ces dix-neuf jeunes, qui ont été formés par l’école de la République au nom du droit à l’éducation, nous avons donc investi sur ces jeunes. Je le répète, ils sont, les dix-neuf, dans des parcours professionnels et d’insertion, ils ont donc complètement leur place dans notre société.

Qu’en est-il des recours gracieux déposés concernant la situation de ces très jeunes majeurs qui ont reçu cette obligation de quitter le territoire français ?

Merci.

M. le Préfet Hottiaux : Madame la Conseillère départementale, d’abord peut-être indiquer qu’avant d’être majeurs, c’étaient des mineurs, et avant toute chose, il faut rappeler que les mineurs étrangers, qui sont protégés par la loi, ne sont pas tenus de disposer d’un titre de séjour pour résider en France jusqu’à leur majorité ; ils sont d’abord protégés, c’est le premier point.

Ces jeunes mineurs sont pris en charge par vos services, Monsieur le Président. Ils apprennent notre langue, ils suivent des formations professionnalisantes pour mieux s’insérer dans notre société.

Aussi, je souhaite rappeler que pour les mineurs non accompagnés pris en charge par l’ASE entre seize et dix-huit ans, l’attribution d’un titre de séjour est une mesure exceptionnelle, mais qu’il n’y a pas d’obligation en soi. Il y a plusieurs critères :

  • la formation qualifiante depuis au moins six mois ;
  • le caractère réel et sérieux du suivi de cette formation ;
  • la nature des liens avec le pays d’origine ;
  • l’avis de la structure d’accueil ;
  • le respect de l’ordre public.

Il y a donc différents critères et nous examinons évidemment les dossiers au cas par cas, au regard des critères qui sont ceux fixés par la loi.

Pour prévenir les ruptures de parcours professionnel des jeunes concernés, nous avons mis en place avec Monsieur le Président du Conseil départemental un protocole qui nous permet d’examiner de manière anticipée – ce n’est pas le cas dans tous les départements, nous avons été parmi les premiers départements à le mettre en place – les demandes de séjour de mineurs non accompagnés qui vont devenir majeurs confiés à l’ASE. Ce dispositif a été signé en juillet 2020, mis en place avec nos prises de fonctions respectives, en quelque sorte. La convention s’inscrit dans une démarche de simplification, elle prévoit un accueil privilégié de ces jeunes et un accès simplifié aux services préfectoraux.

Cet examen anticipé est une possibilité offerte par l’administration, mais ce n’est pas une obligation pour les jeunes concernés. Nous examinons toutes les demandes individuelles – encore une fois – au cas par cas.

Cet accord a conduit les services de la préfecture des Hauts-de-Seine à recevoir davantage – nous avons une multiplication par trois ou par quatre, mais c’est lié à la multiplication par trois ou par quatre du nombre de MNA (mineurs non accompagnés) accueillis par l’ASE – de jeunes MNA proches de la majorité.

Parmi les jeunes MNA reçus en préfecture, certains, effectivement, se sont vu notifier des obligations de quitter le territoire, obligations qui sont motivées par, justement, les critères que j’ai indiqués, puisqu’il y a plusieurs dimensions : une dimension de protection et d’insertion, incontestablement, et vous avez tout à fait raison, mais aussi des dimensions d’ordre public que je dois prendre en compte, qui sont aussi une dimension importante de l’action de l’État, de régulation des flux migratoires, de lutte contre les filières liées à l’immigration irrégulière, et donc, évidemment, je dois prendre en compte et les services préfectoraux doivent prendre en compte ces différentes dimensions dans l’examen individuel de chacun des dossiers.

Comme vous l’avez indiqué, à chaque fois que des situations individuelles ont été signalées, les services ont examiné ou réexaminé ces situations, pour bien vérifier qu’elles se situent bien dans le cadre de la loi.

Après, si les personnes concernées ou les associations contestent ces décisions, elles ont toujours la capacité de pouvoir les contester devant la juridiction administrative, mais je peux vous dire que ces dossiers sont examinés de très près. ll n’y a pas de régularisation automatique, c’est très clair, mais nous regardons chaque situation avec l’esprit que vous indiquez, notamment s’agissant de celle des personnes qui sont dans une démarche d’acquisition de compétences professionnelles et d’insertion au sein de la société française.

Je vous remercie.

Dérèglement climatique, ilots de chaleur urbains : quelles actions pour protéger les populations du département ?

Question de M. Najib Benarafa : Monsieur le Préfet, la France, mais aussi le Parlement européen ont décrété en 2019 l’état d’urgence climatique pour affirmer leur engagement à limiter le réchauffement de la planète à + 1,5 degré d’ici 2100 et éviter une perte massive de biodiversité. Or, nos émissions de gaz à effet de serre actuelles restent trop importantes pour tenir nos engagements, car le réchauffement s’accélère.

Le dernier rapport du GIEC envisage même un scénario à + 1,5 degré dès 2030.

Certaines analyses indiquent que le climat francilien pourrait être proche d’ici quelques décennies de celui de Séville, et concrètement, cela signifie une accentuation potentielle des vagues de chaleur, de sécheresse, une évolution du régime des précipitations et une élévation des températures moyennes.

À cette question du dérèglement climatique, s’ajoute celui de l’effet d’îlots de chaleur urbains. Les matériaux qui absorbent la chaleur du jour et la restituent la nuit empêchent le refroidissement nocturne des villes. Or, la chaleur aggrave la pollution atmosphérique et son impact sanitaire a des conséquences quantifiables de surmortalité.

Cette hausse des températures aura des effets aussi dans le champ de la biodiversité : écosystèmes perturbés et affaiblis, déshydratation des sols dans les forêts, remontée de certaines espèces vers le nord, comme les moustiques tigres ou les chenilles processionnaires, allongement de la période de pollinisation avec un impact sur les allergies et les maladies respiratoires.

Vous n’avez pas la compétence pour changer la politique mondiale, j’en suis bien conscient. Vous avez, en revanche, celle de prévoir et de mettre en œuvre des moyens pour protéger les populations.

Il existe, certes, pour les épisodes météorologiques extrêmes, le plan grand froid, qui a montré son efficacité grâce à une préparation régulière des équipes mobilisées, il existe également un plan canicule, mais sa mise en œuvre semble encore très théorique et limitée aux populations humaines. D’ailleurs, deux tiers des Français, selon la Croix-Rouge, pensent que les pouvoirs publics ne sont pas prêts, ce qui augmente encore l’éco-anxiété des plus jeunes.

Compte tenu de la récurrence des vagues de chaleur, il conviendrait peut-être, d’ailleurs, de mettre en place ce que l’on appellerait un « plan grand chaud » englobant aussi la biodiversité. Je sais que je fais un peu sourire quand je demande à prendre en compte les arbres, les oiseaux, les insectes et les écosystèmes entiers dans ce plan, mais la biodiversité est dans un état critique. Certains parlent de sixième extinction majeure.

Or, non seulement la biodiversité absorbe une grande partie de la pollution et de la chaleur, mais elle contient aussi des innovations technologiques bien plus précieuses que n’importe quel bien matériel fabriqué par l’homme. Surtout, la présence de cette biodiversité est intimement liée à notre bonne santé.

Toutes ces modifications climatiques risquent d’être brutales, et je voudrais savoir si nous serons prêts, prêts à y faire face le moment venu, et si un état des lieux précis de la situation a déjà été anticipé.

Ma question est donc la suivante : quels sont les moyens mis en œuvre pour diagnostiquer les zones climatiques locales, comme les îlots de chaleur, au sein du Département et a-t-on chiffré les populations humaines à risque, mais aussi la faune et la flore, qui risquent d’être les plus exposées aux vagues de chaleur répétées dans les années à venir, au sein du Département ?

Merci, Monsieur le Préfet.

M. le Préfet Hottiaux :-Monsieur le Conseiller départemental, c’est un sujet évidemment majeur. Dans ses domaines de compétence, l’État veille évidemment à anticiper, à lutter contre le changement climatique, et à protéger la biodiversité, mais c’est une cause à laquelle nous sommes tous attachés et pour laquelle nous sommes très mobilisés.

Au niveau régional, vous savez que le Conseil régional est chef de file en matière de climat, de qualité de l’air et d’énergie. Le Conseil régional et l’État portent conjointement le schéma régional du climat, de l’air et de l’énergie, qui est en cours de révision, qui fait ce diagnostic, et il y a un certain nombre d’actions prévues dans le cadre de ce schéma.

C’est décliné en petite couronne à travers les établissements publics territoriaux, qui élaborent chacun un plan climat-air-énergie, un PCAE comme on dit en termes un peu technocratiques.

Concrètement, ces problématiques appellent à l’atteinte de l’objectif de zéro artificialisation nette, c’est l’objectif majeur qui est à décliner dans les documents d’urbanisme, objectif dit « ZAN », qui va contribuer notamment à réduire l’effet des îlots de chaleur, comme vous l’indiquez. Cet objectif est inclus dans le projet de révision du SDRIF (schéma directeur de la région Île-de-France) au niveau régional, et localement, les services de l’État sont très impliqués, la DRIEATS pilote une étude départementale avec le Cerema (centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement) sur l’identification du potentiel de renaturation de la zone dense francilienne. Il y a un focus notamment sur les territoires de Boucle nord de Seine et de Vallée sud Grand Paris.

Nous avons aussi mis en place un Réseau transition énergétique 92, copiloté par la DRIEATS et l’ADEME (agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie), qui s’adresse aussi à tous les acteurs de la transition énergétique : collectivités, agences locales de l’énergie, syndicats d’énergie, entreprises.

Depuis le début de l’année, le réseau transition énergétique et villes durables à destination des collectivités du 92 œuvre pour échanger des solutions pour l’aménagement durable dans un environnement à la fois dense et contraint.

L’ensemble de ces éléments contribue à apporter des réponses locales et concrètes à ces problématiques que nous partageons, au-delà, comme vous l’avez indiqué, des mesures d’urgence qui sont prises, notamment lors des pics de pollution, pour que nous puissions mieux anticiper et mieux nous adapter au changement climatique, sachant qu’il y a au niveau départemental une mobilisation forte sur ces sujets.

Comme vous l’avez laissé entendre, c’est à multi-échelle, mais nous pouvons faire beaucoup de choses aussi au plus près du terrain, je partage votre avis.

Merci beaucoup.



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