Délibération modificative du budget 2024 : les conséquences d’un modèle de financement absurde

Intervention de Joaquim Timoteo lors de la séance plénière du Conseil départemental des Hauts-de-Seine du 18 octobre 2024.

Monsieur Président, chers collègues, 

Cette 1ère décision budgétaire modificative n’appelle pas sur la forme de notre part de remarques approfondies. Elle procède à des ajustements en recettes et dépenses avec des désinscriptions de crédits de l’ordre de 4M€ pour le fonctionnement et de 2,5M€ pour l’investissement.  

Rien qui ne change fondamentalement l’économie générale du budget, ce qui fait (vous n’en serez pas étonnés) que notre groupe ne la votera pas. 

Certes cet ajustement du budget intègre dans le champ de la solidarité un ensemble de dépenses de fonctionnement supplémentaires que nous saluons, qui sont notamment liées au Ségur et visent les personnels des différents établissements. Il procède aussi à la désinscription de crédits en dépense d’investissement pour quelques opérations de construction qui ont pu prendre du retard. 

Pôle Léonard de Vinci : où en est-on ?

En revanche, étant donné qu’il y est fait référence à plusieurs reprises, nous aimerions que vous puissiez nous faire un point d’étape de la situation du Pole Leonard de Vinci. Nous savons que le juge administratif en appel a validé en mai dernier le protocole avec l’Association Leonard de Vinci et donc un montant de redevance due par celle-ci d’environ 30M€ (dont une partie mineure a été versée). Comme nous voyons que plus de 24M€ concernant la restructuration du Pôle sont désinscrits, nous voulions savoir si le départ de l’occupant est toujours fixé au mois d’août 2025 et si le siège du Conseil Départemental rejoindra bien à terme ce bâtiment.  

Les conséquences du PLF 2025.

Si on vient maintenant côté recettes, cela appelle quelques remarques puisque la situation est à regarder avec prudence et à mettre en perspective avec ce qui se prépare ailleurs dans le cadre du PLF2025. Et nous pourrions presque commencer aujourd’hui un début de débat sur les orientations budgétaires à venir… 

La fluctuation du produit des DMTO était attendue donc pas de surprise en soi. En revanche la volatilité du produit des fractions de TVA est alarmante alors qu’elle avait été vendue aux Départements comme lot de consolation après la suppression de la taxe foncière (seul impôt levé par les Départements) et de la CVAE. Ce que l’on prédisait, arrive tout doucement. Progressivement on a resserré les cordons de la bourse des collectivités et plus particulièrement des Départements, tout en leur demandant d’assumer leurs missions en remplaçant les produits de l’impôt local par des dotations ou des transferts de taxes dont on voit clairement la fragilité aujourd’hui. 

Alors que les besoins sociaux explosent, les moyens financiers des Départements se resserrent considérablement.  

Vraiment, on marche sur la tête avec un modèle financier absurde qui indexe d’une certaine manière les ressources de la collectivité, qui est cheffe de file du social, sur le cours du marché immobilier et sur l’évolution nationale de la TVA. C’est complètement ahurissant. Nous ne pouvons nous résoudre à ce que le seul horizon dans ce contexte soit celui de la restriction budgétaire alors même que les besoins des publics les plus vulnérables ne cessent d’augmenter  

C’est ce qu’augure ce qui va nous arriver dans la prochaine Loi de Finances et qui est inacceptable. Avec l’addition que l’État demande aux collectivités de régler à sa place en prélevant pour commencer 2% des recettes de fonctionnement à la source. 

Pour les Hauts-de-Seine, c’est près de 100 Millions d’euros qui seront prélevés aux collectivités !  35M€ pour notre département et plus de 60M€ pour les communes altoséquanaises qui vont être tapées (1,5M€ pour ma ville, Montrouge). Ces coupes budgétaires déployées dans un contexte d’austérité, impacteront nécessairement les missions essentielles des Départements, qui par ailleurs ont de dépenses contraintes  

D’un point de vue plus général, selon le gouvernement, les collectivités locales dans leur globalité seraient amenées à participer à hauteur de 5 Milliards d’euros à l’effort budgétaire. En réalité, ce sera bien plus, car à côté des 2% de prélèvements sur le fonctionnement (qui va rapporter en gros 3Mds €), il faut rajouter : 

  • suppression de la dynamique de compensation via la TVA (1,2 Md€)  
  • contraction des transferts au titre du FCTVA (800 M€)  
  • augmentation du taux de cotisation patronale à la caisse nationale de retraite des collectivités locales CNRACL (1,3 Md€).  
  • baisse de l’enveloppe du Fonds vert (1,5 Md€)  
  • fin de l’automaticité du chèque énergie qui impactera notamment nos CCAS (300M€)  

On est plus proche des 8 Mds que des 5 Mds annoncés. Si on y rajoute les effets de l’inflation, prévue à 1,8% en 2025, ce sont près de 2Md€ d’efforts supplémentaires qui sont demandés. 

En réalité, ce sont près de 10Mds€ qui seront demandés sur une seule année en 2025 aux collectivités. Et c’est la casse sociale assurée dans beaucoup d’endroits.  née en 2025 aux collectivités. Et c’est la casse sociale assurée dans beaucoup d’endroits.  

La responsabilité de l’Etat

Si le déficit de l’Etat est à un tel niveau, c’est parce que l’Etat lui-même s’est privé de recettes. La suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune c’est plus de 20 Mds de recettes en moins en cumulé. Dans le même temps les 500 familles les plus riches de France ont doublé leurs actifs (1 200 Mds €). 

Les baisses d’impôts induites par les réformes des 7 dernières années représentent au total une perte de recettes estimées à 62Mds € par an selon la Cour des comptes.  

L’échelon local, obligé de voter des budgets équilibrés, n’a rien à voir avec cette dégradation. 

Des solutions pour trouver des recettes existent. Les groupes de gauche à l’Assemblée nationale et au Sénat ont fait en ce sens des propositions pour obtenir 49 Mds sans aucune hausse d’impôts pour les classes moyennes et populaires et sans matraquage des collectivités : suppression de la Flat Tax, re-création d’un ISF, recadrage du crédit impôt recherche, taxation des super-profits, rétablissement de la CVAE, etc… 

J’espère que nos parlementaires réussiront à renverser un peu la vapeur en ce sens, pour plus de justice fiscale et plus de justice sociale, et en évitant de faire les poches aux collectivités locales 

Retrouver ICI notre compte rendu complet de la séance publique du 18 octobre 2024.

Vous aimerez aussi...

Pin It on Pinterest