Bilan des émissions de gaz à effet de serre 2023 et plan de décarbonation 2025-2027
Intervention de Najib Benarafa lors de la séance plénière du Conseil départemental des Hauts-de-Seine du 4 juillet 2025.
Un bilan carbone important et inquiétant.
Inquiétant d’abord parce qu’avec toute la compétence du département, il reste très complexe de comptabiliser l’empreinte carbone d’une collectivité, alors que c’est indispensable et même obligatoire depuis peu.
Inquiétant aussi, parce que les nombreuses mesures, réelles et concrètes du Département, et malgré les ajustements à isopérimètre, la quantité de GES émise, n’a pratiquement pas diminué depuis 2021 : elle reste globalement la même : 115 000 T équivalent CO2 avec probablement une marge d’erreur importante.
Inquiétant enfin parce que l’objectif de neutralité carbone à atteindre en 2050, dans le respect de l’Accord de Paris, a peu de chances d’être atteint à ce rythme-là.
En 2015, le monde entier s’était accordé pour rester en dessous des +1,5°C au niveau mondial. Malheureusement au rythme où les choses évoluent, les +1,5°C devraient être atteints dès 2028.
Donc il faut aller plus vite dans la décarbonation. Ce n’est pas moi qui veut aller plus vite. C’est le réchauffement climatique qui va plus vite et qui s’accélère. On en train d’en voir en ce moment en France. Les anomalies thermiques de ce mois de juin ont enregistré une moyenne de +3.5°C en France.
Pourquoi notre bilan carbone ne baisse pas alors significativement alors que les transformations opérées dans les collèges et les économies d’énergie ont un effet réel à long terme sur l’empreinte carbone ?
Le rapport de présentation ne le dit pas clairement, ce qui est dommage pour le diagnostic. Les efforts du département sont réels mais je ne sais pas s’il faut se réjouir de cette stabilisation seulement des émissions de GES ?
Agir pour la décarbonation génère des bénéfices pour la santé en luttant contre les îlots de chaleur, en renaturant le paysage, ce qui génère des bénéfices pour l’environnement mais aussi pour notre économie à long terme.
Je le souligne, pas pour les écologues, qui ont rédigé ce rapport et qui en sont parfaitement conscients, mais pour la plupart des altoséquanais, y compris dans cette assemblée représentative, la décarbonation impose de changer d’habitudes, de renverser des monopoles dominants et donc ne se fera pas spontanément.
Si on tous ici convaincu ici qu’il y a urgence climatique, que les pics d’aujourd’hui à 40°C seront dans quelques années des pics à 50°C et que la plupart des arbres qu’on a planté ne survivront pas. Alors il faut admettre qu’il ne faut pas juste un plan de décarbonation non contraignant, mais un plan d’urgence climatique.
Ne répétons pas les erreurs du précédent plan de décarbonation
Je ne critique pas pour critiquer, car le département a investi beaucoup pour se développer, se renouveler tout en stabilisant ses émissions de gaz à effet de serre mais le Bilan du plan de décarbonation 2022 – 2024, montre qu’il n’était pas assez contraignant et j’ai bien peur que l’on refasse la même erreur pour le plan de décarbonation 2025-2027.
Par exemple, je rappelle que 33% des émissions de GES du département sont liées aux produits achetés. On ne peut pas juste dire aux prestataires de prendre en compte des considérations environnementales. Les fournisseurs doivent, associer à leur grille tarifaire, le facteur d’émissions de chaque item, c’est-à-dire indiquer le volume d’émissions de gaz à effet de serre générées pour fournir le produit ou service considéré. A prix égal, le poids carbone d’un produit ou d’un service peut varier du simple au double, voir plus !
Le Schéma de Promotion des Achats Publics Socialement et Écologiquement Responsables (SPASER) même avec une forte sensibilisation ne suffira pas pour responsabiliser les autres acteurs ou nos partenaires sauf si on ajoute des bonus ou des malus.
Dans le plan d’action précédent il était précisé que les cantines des collèges devaient « Favoriser un approvisionnement responsable, en termes de qualité et de quantité ». La formulation n’étant pas contraignante en termes d’émissions de GES, nos deux prestataires Sodexo et Elior n’ont d’ailleurs, à mon grand désarroi, fourni aucun bilan carbone sur les aliments servis ces 3 dernières années.
Alors que l’on sait que les collèges représentent 1/3 de l’empreinte carbone du département. Si on ne met pas de pression sur ces fournisseurs pour avoir cette transparence, on n’arrivera jamais à la neutralité carbone.
Toutes les proposition d’action du Plan décarbonation 2025-2027 vont dans le bon sens, même s’il n’y a pas d’annonces surprises, juste une mise en valeur de ce qui a été déjà entrepris et malheureusement toujours pas ou peu d’objectifs chiffrés.
Dans les 7 leviers d’action, ce plan néglige cependant même l’empreinte carbone numérique des IA génératives dont l’utilisation sera extrêmement gourmande en énergie et en eau et dont personne vraiment n’a mesuré l’impact carbone. Il y a beaucoup de nos agents qui sont en télétravail ce qui diminue l’empreinte de leurs déplacements mais combien utilisent des IA génératives ? Quel est leur réel impact ?
Les puits de carbone sont abordés à travers tous les plans de végétalisation, de désimperméabilisation et acquisition d’espace naturel sensibles ce qui est essentiel, mais je crois que l’on sous-estime encore l’importance de la Seine et des zones humides.
Une étude internationale, à laquelle ont participé l’INRAE et le CEA en mars 2025, montre que la majorité de l’accumulation du carbone terrestre depuis plus de 30 ans se fait dans des environnements sans oxygène, comme dans le fond des rivières et les zones humides. Favoriser ces zones humides permettrait à la fois d’absorber le surplus des précipitations, causes d’inondations, et de séquestrer du carbone de manière plus efficace qu’une forêt.
La situation dans les Hauts-de-Seine
Maintenant, si on prend du recul, ramené au nombre d’habitants des Hauts-de-Seine, la part carbone de l’activité départementale ne correspond qu’à 70 kgCO2e par altoséquanais. C’est proportionnellement faible, quand on sait que chaque individu pèse à lui seul 8 tonnes éq CO2/an voire 12 tonnes, s’il est plus aisé.
Mais le département des Hauts-de-Seine pèse beaucoup plus que cela, il a une image, un rayon d’action et une influence importante.
Vous avez fait de ce département un acteur respecté et écouté par les milieux économiques. Paris La Défense, est le deuxième quartier d’affaires le plus attractif en Europe, après la Cité de Londres, et le 4e dans le monde. Ce quartier abrite, notamment, les sièges de nombreuses entreprises françaises et étrangères ainsi que de toutes les autorités bancaires dont une partie finance la prospection de nombreux gisement fossiles responsables du réchauffement climatique.
Vous voulez faire de Paris la Défense le premier quartier d’affaires post-carbone de dimension mondiale. Alors, réunissez tous ces acteurs économiques !
Les Total, les BNP, Société Générale, les Engie et les dizaines d’entreprises présentes et qui ont le plus d’impact carbone.
Organisez une COP des acteurs de La Défense et trouvez, en concertation, des solutions systémiques pour diminuer les émissions de gaz à effet de serre significativement de la planète Un vrai plan de décarbonation, vous le savez ne peut se faire que si tout le monde est impliqué !
Servez-vous de l’influence du Département des Hauts-de-Seine sur ces Grands Groupes, faites de notre collectivité un leader de l’économie post carbone et de la transition écologique !
C’est cela qui développera l’attractivité de Paris La Défense, tout en sauvant l’humanité du désastre climatique.
Retrouvez le compte rendu complet de la séance et les votes du groupe ICI.